Depuis son invention en Chine en 2005, la cigarette électronique (ou vapoteuse, vaporette, vape ou encore e-cig) surfe sur une ambiguïté, celle d’une solution alternative à la cigarette traditionnelle sans risque pour la santé. Or cet instrument qui sert à délivrer de la vapeur artificielle aromatisée contient souvent de la nicotine, ce qui, dans ce cas, contredit l’argument – la nicotine étant élément moteur de dépendance.
« On a dit pendant longtemps qu’il n’y avait pas de toxicité, mais ce n’est pas si évident, même si c’est moins important que pour la fumée de cigarette car il n’y a pas de combustion. Mais on a peu de retours, d’études, de regards cliniques » signale Alexis Grandcolas infirmier au Csapa 25.
Pas de combustion signifie pas de rejet de monoxyde de carbone, gaz toxique et nocif pour la santé. Cependant, à titre préventif, le site Stop tabac rappelle que
« forcément, inhaler de la vapeur de fumée de façon quotidienne, de manière passive ou active, pourra avoir des répercussions sur les voies circulatoires et l’état des bronches » (2).
Il n’existe pas une cigarette électronique mais différentes selon la présence de nicotine, son taux, la proportion de propylène glycol (PG) et de glycérine végétale, les deux principaux composants des e-liquides. Selon les rares données disponibles, les risques de l’exposition au propylène glycol et à la glycérine sembleraient très faibles lors de l’inhalation, mais une toxicité à long terme en cas d’usage répété et prolongé ne peut pas être exclue - forcément, il n’existe pas encore d’étude sur l’utilisation à longue durée. Ponctuellement, l’utilisation peut provoquer un picotement irritatif. Surtout, le matériel nécessite un entretien soigné, pour éviter des inconvénients tels que le « dry hit ». Ce dernier se produit lorsque le coton présent dans la résistance n’est plus assez imbibé. En brûlant, il dégage une fumée très nocive. Il faut alors changer la résistance, sinon le goût nauséabond et potentiellement toxique reste. Autre problème potentiel, si l’e-liquide est trop épais, il peut produire un aérosol très toxique. Un dosage trop fort en propylène glycol peut être nocif. Au-delà de ces éléments, le site Stop tabac extrapole :
« vapoter va diminuer la fonction pulmonaire et entraîner une augmentation du risque de maladies pulmonaires (…) et du risque de maladie cardiovasculaire ».
Les puffs en voie d'interdiction
L’argumentaire marketing surfe sur la méconnaissance réelle des effets d’un produit encore nouveau.
« La consommation semble stagner actuellement, mais elle a été jusqu’à présent en augmentation, par effet de mode et en raison de cette insistance sur l’idée de sevrage tabagique ».
Pourtant, les puffs, systèmes électroniques semblables mais jetables, sont en passe d’être interdits (1). Or ce sont les mêmes produits.
« Mais les puffs sont moins écologiques et clairement destinés à la consommation voire à la surconsommation, pas du tout à la réduction des risques. Colorés, ayant l’apparence de gadgets, avec des arômes évoquant le chocolat ou la fraise ils sont clairement faits pour attirer les plus jeunes. Ce sont purement des objets commerciaux » insiste Alexis Grandcolas. Les puffs sont d’ailleurs interdits aux mineurs, même si dans la pratique ces derniers n’ont aucun mal à s’en procurer. Selon une étude d'Alliance contre le tabac publié en novembre 2023, 15 % des ados avaient à l'époque déjà utilisé une puff et parmi eux, 47 % ont commencé leur initiation à la nicotine à travers ce dispositif. Dans son avis sur l'interdiction des puffs, la Commission européenne a fait ce rappel :
« Étant donné qu’une seule cigarette électronique jetable peut équivaloir à plusieurs paquets de cigarettes classiques, les jeunes peuvent développer une forte dépendance à la nicotine sans même s’en rendre compte. Comme l’ont souligné les autorités françaises, outre son effet addictif, la nicotine peut avoir un effet néfaste sur le développement cérébral, en particulier chez les jeunes. L’utilisation de cigarettes électroniques jetables risque également de constituer une porte d’entrée vers le tabagisme traditionnel chez les jeunes et les non-fumeurs. »
Le passage de la vape à la cigarette, effet inverse de celui escompté, est donc un autre danger repéré. Cet objet qui serait une substitution pour certains serait donc initiateur pour d’autres, d’autant que les lieux d’interdiction de consommation sont moins limités que pour la cigarette classique.
« Ce risque existe par rapport à l’accoutumance à la nicotine mais aussi à une gestuelles semblable explique Alexis Grandcolas.
C’est paradoxal car c’est quand même un outil de réduction des risques pour les personnes habitués à la cigarette, non seulement parce qu’elle supprime la toxicité liée à la combustion mais aussi parce qu'elle peut effectivement progressivement abaisser l’addiction à la nicotine ». C’est en lien avec cette possibilité qu’une association telle que
la Vape du coeur a pu progressivement se mettre en place, depuis 2014, son action dans la réduction des risques du tabac fumé auprès des personnes en situation de précarité (5).
Chaque profil étant particulier, il est de toute façon recommander de consulter un professionnel afin d’établir le programme de substitution sur mesure, car il existe d’autres produits (patchs, gommes, comprimés, pastilles, sprays...) aussi efficaces voire plus.
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